Examen clinique du patient et fiche d'observation

Examen clinique du patient

Examen clinique du patient et fiche d’observation

En odonto-stomatologie, tout comme dans d’autres domaines de la médecine, l’examen clinique demeure la première étape cruciale dans l’approche diagnostique de toute pathologie médicale.

I. Conduite de l’examen clinique :

Cet examen doit être méthodique, rigoureux, avec une analyse logique et précise tout au long des différentes étapes, à savoir l’in te rr og a to ire suivi de l’examen clinique proprement dit.

  1. I nt e rr o ga toi re :

L’in t er r o g a t oi re constitue le premier volet de l’examen, ainsi que la première interaction avec le patient.

Il revêt une importance primordiale, car il permet d’orienter le diagnostic dès le départ et influence les relations de confiance futures avec le patient.

Cet in te rrog ato ire débute par la collecte de données d’état civil telles que le nom, l’âge, la profession du patient. Ensuite, il s’attarde sur :

  • Le motif de la consultation, en recueillant et en analysant les différents symptômes qui ont conduit le patient à consulter.
  • L’état de santé général du patient, incluant toute pathologie en cours de traitement.
  • L’objectif est d’évaluer s’il existe un risque médical potentiel, qu’il soit d’ordre infectieux (risque d’endocardite infectieuse élevé, immunodépression, etc.), hémorragique (prise d’anticoagulants, hémophilie, etc.), allergique ou toxique (interactions médicamenteuses).
  • De plus, l’état de santé général peut influencer le pronostic du traitement.
  • Les antécédents médicaux et chirurgicaux du patient, en particulier ceux qui pourraient avoir une incidence sur les traitements envisagés ou nécessiter des précautions particulières.
  • L’historique bucco-dentaire du patient, notamment tout épisode douloureux, de difficultés lors d’extractions dentaires antérieures, ou autres affections bucco-dentaires.
  • Les habitudes de vie du patient, telles que l’hygiène bucco-dentaire, la consommation de tabac, d’alcool, etc.
  1. Examen proprement dit :

L’examen clinique proprement dit est guidé par les informations obtenues lors de l’in te rr o gato ire et a pour objectif de détecter les signes objectifs de l’affection.

Cet examen est visuel (inspection) et tactile (palpation), basé sur une comparaison avec la norme et réalisé de manière symétrique.

Il débute traditionnellement par l’examen extérieur de la bouche (examen exo-buccal), se poursuit par l’examen intérieur de la bouche (examen endo-buccal), et peut inclure un examen somatique général si nécessaire.

Le patient est confortablement installé dans un fauteuil, et l’examen requiert un équipement approprié, notamment un bon éclairage et des instruments spécifiques tels que des abaisse-langue, des miroirs, des sondes, des gants ou des doigtiers pour la palpation, etc.

2.1. Examen exo-buccal :

L’inspection débute en réalité dès og a to ire, avec l’observation de signes éventuellement évidents. L’examen de la région cervico-faciale est réalisé en trois principales incidences (face, profil, incidence axiale) et comporte plusieurs étapes :

  • L’évaluation des rapports entre les trois étages du visage et la recherche de symétrie faciale, car une asymétrie peut parfois résulter d’un processus infectieux ou inflammatoire ou de la présence d’adénopathies.
  • L’analyse de l’état des téguments, incluant la couleur, la souplesse, la présence de lésions cutanées éventuelles (plaies, éruptions cutanées, cicatrices, etc.).
  • La palpation douce et progressive à l’aide d’un ou plusieurs doigts ou des deux mains, permettant de rechercher notamment la présence de douleurs (qu’elles soient localisées ou diffuses), d’apprécier la température et la sensibilité des tissus, d’évaluer la consistance des éventuelles tuméfactions (osseuses ou fluctuantes), leur mobilité par rapport aux structures sous-jacentes, ainsi que la présence d’anomalies au niveau des reliefs osseux, notamment en cas de traumatisme (décalage ou mobilité anormale, par exemple).
  • L’examen des articulations temporo-mandibulaires (ATM) à travers une palpation bimanuelle, symétrique et comparative des deux côtés.
  • Cet examen permet de percevoir les mouvements condyliens (en vérifiant leur symétrie et leur coordination, ou en détectant d’éventuels signes d’asynchronisme), de repérer le côté le plus sensible ou douloureux, et de détecter la présence de bruits articulaires tels que des claquements ou des craquements, qui pourraient évoquer un syndrome dysfonctionnel de l’appareil manducateur.
  • L’examen des muscles masticateurs pour rechercher d’éventuelles zones douloureuses, notamment au niveau des insertions musculaires.
  • La palpation des aires ganglionnaires, étape cruciale en cas d’examen clinique orienté vers une suspicion de pathologie néoplasique, infectieuse ou hématologique.
  • Cela implique l’exploration des différentes aires cervico-faciales à la recherche d’adénopathies.
  • Les critères évalués incluent le nombre (adénopathie unique ou multiples), la localisation, la taille, la consistance, la mobilité par rapport aux tissus superficiels et profonds, ainsi que la sensibilité des adénopathies palpées.
  • L’examen des glandes salivaires, notamment les glandes parotide, submandibulaire et sublinguale, en recherchant la présence de tuméfactions et en évaluant toute douleur provoquée lors de la palpation. Une évaluation complète des glandes salivaires sera réalisée lors de l’examen endo-buccal.
  • L’évaluation de la sensibilité et de la motricité faciale.
  • L’examen de la sensibilité explore les territoires sensitifs du nerf trijumeau afin de détecter tout trouble sensitif, comme une zone d’hypoesthésie, d’hyperesthésie ou de paresthésie. L’examen de la motricité faciale permet de repérer d’éventuels déficits moteurs dans différents territoires innervés par le nerf facial.

Cette étape méthodique et complète de l’examen exo-buccal permet au praticien d’identifier tout signe clinique objectif de pathologie potentielle chez le patient.

2.2. Examen de la cinétique mandibulaire :

Lors de l’examen de la cinétique mandibulaire, le praticien évalue plusieurs aspects :

  • L’ouverture buccale est mesurée à l’aide de ses doigts ou d’un pied à coulisse pour déterminer l’espace entre les points inter-incisifs supérieur et inférieur.
  • La valeur de référence pour une ouverture buccale normale est d’environ 47,7 mm (équivalant à 3 travers de doigt).
  • Si l’ouverture buccale mesure plus de 20 mm, on la qualifie de légèrement limitée.
  • Une limitation modérée de l’ouverture buccale est définie pour des mesures comprises entre 10 et 20 mm.
  • L’ouverture buccale est considérée comme serrée lorsque l’amplitude est inférieure à 10 mm.
  • Le trajet d’ouverture et de fermeture mandibulaire est observé, en vérifiant sa régularité dans le plan sagittal, qu’il s’agisse d’une ouverture rectiligne ou déviée.

2.3. Examen endo-buccal :

Cet examen doit être systématique et couvrir toutes les régions de la cavité buccale, en examinant minutieusement l’ensemble des plis muqueux.

L’examen des muqueuses buccales repose sur une analyse détaillée des lésions visibles et palpables, permettant d’identifier des lésions élémentaires telles que des érythèmes, des érosions, des ulcérations, etc.

Les caractéristiques de ces lésions élémentaires, telles que leur couleur, leur souplesse, leur emplacement et leur évolution, fournissent des informations essentielles pour établir un diagnostic étiologique.
Si le patient porte des prothèses dentaires amovibles, l’examen doit être réalisé à la fois avec et sans les prothèses en bouche.

Il est également important d’examiner les prothèses pour détecter toute anomalie pouvant provoquer des blessures à la muqueuse buccale.

  • Évaluation de l’hygiène bucco-dentaire : L’hygiène dentaire est évaluée pour déterminer s’il est nécessaire de motiver le patient à améliorer son hygiène buccale avant tout traitement.
  • Examen des lèvres : Cet examen permet d’évaluer l’état du versant cutané et muqueux des lèvres, le tonus musculaire labial, ainsi que la hauteur d’insertion des freins labiaux et leur impact sur les arcades dentaires et le parodonte marginal. Tout signe de plaie ou de lésion érosive doit être noté, car cela peut évoquer diverses affections.
  • Examen de la face interne des joues : L’examen de la muqueuse des joues permet d’évaluer son état ainsi que l’ostium de Sténon, situé en regard de la première molaire maxillaire.
    La pression simultanée sur la glande parotide permet d’apprécier la qualité et la quantité de salive qui s’écoule à l’ostium, ce qui peut aider à détecter des anomalies.
  • Examen du plancher buccal : Le patient positionne la pointe de sa langue au palais pour permettre au praticien d’examiner et de palper le plancher buccal.
    La palpation bidigitale des glandes sous-maxillaires et sublinguales permet de rechercher toute tuméfaction ou induration, d’apprécier la qualité et la quantité de salive qui s’écoule à l’ostium des glandes.
  • Examen de la langue : L’examen de la langue peut être facilité en la tir ant doucement à l’aide de deux doigts après avoir entouré sa pointe d’une compresse.
    L’organe est d’abord observé dans une position statique pour évaluer plusieurs paramètres, notamment sa forme, son volume (macro- ou microglossie), sa position au repos, et l’aspect de sa muqueuse, y compris sa couleur, sa sensibilité, l’hyperplasie des papilles, ou au contraire, la disparition des papilles.
    Ensuite, la langue est examinée lors de ses différentes fonctions, comme la déglutition et la phonation, pour évaluer sa position, sa mobilité et le rôle du frein lingual, dont la longueur peut affecter l’élévation ou la protrusion de la langue.
  • Examen de la base de langue : La base de la langue est accessible à la vision indirecte en utilisant un miroir et au toucher.
  • Examen de la voûte palatine et du voile du palais : L’examen de la muqueuse de la voûte palatine peut être réalisé directement ou en utilisant un miroir.
    La langue du patient est généralement abaissée avec un abaisse-langue pour faciliter cet examen.
  • Examen des dents : L’examen des dents consiste à établir une formule dentaire pour estimer l’âge dentaire et vérifier s’il correspond à l’âge civil du patient. Cet examen permet également de repérer :
    • Les dents manquantes (en raison d’un retard d’éruption, d’une agénésie ou d’une extraction antérieure).
    • Les dents couronnées ou traitées, en précisant la qualité des restaurations prothétiques.
    • Les dents cariées ou délabrées.
    • Les malpositions dentaires ou les anomalies morphologiques.
    • La percussion des dents cariées ou traitées, en utilisant une percussion latérale (pouvant indiquer une probable pulpite si douloureuse) et axiale (pouvant suggérer une possible desmodontite si douloureuse).
    • La réalisation de tests de vitalité pulpaire (par des stimuli thermiques ou électriques) pour détecter d’éventuelles nécroses pul-paires.
    • L’examen attentif des colorations suspectes, car elles peuvent indiquer une nécrose pulpaire.
  • Examen du parodonte : Cet examen porte sur l’état de la gencive, en évaluant son apparence (normalement de couleur rose pâle), sa consistance (normalement ferme et peu dépressive), son volume (augmenté en cas de gingivite hypertrophique), ses attaches dentaires (en recherchant des récessions gingivales indiquant une migration apicale de l’attache épithéliale au-delà de la jonction amélo-cémentaire), et en mesurant les poches parodontales à l’aide de sondes graduées.
    Une éventuelle mobilité dentaire est également recherchée et quantifiée.
  • Examen de l’occlusion : L’évaluation de l’occlusion dentaire est essentielle en cas de pathologie malformative ou traumatologique.
    Elle permet de détecter diverses anomalies, notamment dans le plan frontal (comme des contacts prématurés, des supraclusions ou des infraclusions), dans le plan sagittal (comme des protrusions ou rétrusions maxillaires ou mandibulaires), et dans le plan axial (comme des latérodéviations).

  1. Examens complémentaires :

En complément de l’examen clinique, plusieurs examens supplémentaires (radiologiques, sanguins, bactériologiques, anatomopathologiques) peuvent être nécessaires pour compléter, confirmer ou préciser le diagnostic.

Leur objectif principal est d’apporter des informations complémentaires pour affiner le diagnostic ou exclure d’autres hypothèses lorsque plusieurs diagnostics sont envisageables.

Ces examens complémentaires ne peuvent pas à eux seuls établir un diagnostic, et leur utilisation doit être basée sur des doutes justifiés, en prenant en compte le rapport coût-bénéfice de chaque prescription.

III. La fiche d’observation :

À la suite de l’in te r r og a toi re et de l’examen clinique, le praticien rédige une fiche d’observation de manière concise, objective et scientifique.

Cette fiche synthétise les résultats des examens cliniques et complémentaires et est enregistrée dans le dossier clinique du patient, qu’il s’agisse d’un dossier papier ou électronique.

Elle est précieuse pour établir le diagnostic, planifier la prise en charge du patient et transmettre des informations essentielles. En outre, la fiche d’observation revêt un caractère pédagogique, scientifique et médico-l é g a l.

Fiche d’observation Document médico-l é g al Diagnostic

En conclusion :

L’examen clinique revêt une importance capitale dans la prise en charge des patients. Il s’agit d’un examen systématique, adapté en fonction de l’orientation diagnostique recherchée.

Il est essentiel de lui consacrer le temps nécessaire pour établir un diagnostic précis, car cela constitue la base d’une approche thérapeutique efficace.

Références bibliographiques :

  • Maladière E., Vacher C Examen clinique en stomatologie EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Stomatologie, 22-010-A-10, 2008
  • Morgon L., Béry A Examen de la denture EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Odontologie / Orthopédie dentofaciale, 23-460-D-10, 2005, Médecine buccale, 28-235-M-10, 2008
  • flug F., Boisramé-Gastrin S Examen au fauteuil EMC (Elsevier Masson SAS, Paris), Médecine buccale, 28-230-H-10, 2009

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