le biofilm bactérien

Le Biofilm Bactérien

Le Biofilm Bactérien : Une Exploration de la Communauté Microbienne Buccale

Le biofilm bactérien: La bouche, cet environnement chaud et humide, abrite une communauté microbienne unique, capable de soutenir la croissance d’une multitude de micro-organismes, y compris des virus, des mycoplasmes, des bactéries, des champignons et des protozoaires.

Parmi ces habitants, les bactéries se démarquent en tant que groupe microbien le plus prédominant, caractérisé initialement par des méthodes de culture microbienne (10).

Un Aperçu Historique (1)

L’existence de dépôts dentaires n’est pas une découverte récente :

  • Rhazi, né en 850, a écrit sur les dépôts dentaires, le noircissement et la saleté des dents.
  • Abou El Kassis, entre 913 et 1013, a établi un lien entre le tartre et les problèmes gingivaux, utilisant le détartrage comme traitement.
  • En 1660, Robert Hooke fut le premier à observer les cellules au microscope simple, tandis qu’Antonie van Leeuwenhoek découvrit des bactéries dans la plaque dentaire, les nommant “anim acules”.

Deux siècles plus tard, la théorie microbienne des maladies suscita des recherches approfondies sur les dépôts dentaires.

  • De 1880 à 1930, l’âge d’or de la microbiologie vit des chercheurs identifier quatre groupes potentiels d’agents étiologiques des affections parodontales : les amibes, les spirochètes, les fusiformes et les streptocoques. En 1898, BLACK, père de la dentisterie moderne, introduisit le terme “plaques gélatineuses microbiennes”.
  • De 1930 à 1960, la recherche se concentra sur la quête d’une cause unique pour les affections bucco-dentaires.
  • De 1960 à 1990, la théorie d’un agent microbien spécifique céda la place à des théories non spécifiques, reconnaissant l’ensemble de la flore de la plaque comme un acteur dans la destruction parodontale. Le terme “Biofilm” remplaça progressivement celui de “plaque dentaire” ou “plaque bactérienne” à partir des années 70.

Un Rappel Microbiologique sur les Bactéries (4)

1.1. Définition

Les bactéries sont des micro-organismes unicellulaires de petite taille, classés parmi les procaryotes car dépourvus de noyau individualisé. Leur membrane plasmique contient de nombreuses protéines qui assurent des fonctions structurales, métaboliques et énergétiques.

Les bactéries ont généralement un diamètre inférieur à 1 mm et sont visibles au microscope optique, soit à l’état frais soit après coloration. Elles adoptent différentes formes, notamment sphériques (cocci), en bâtonnets (bacilles), incurvées (vibrion) ou spiralées (spirochètes).

Ainsi, le biofilm bactérien dans la cavité buccale est un domaine fascinant de la microbiologie, où la diversité des micro-organismes et leur interaction avec notre santé dentaire ont suscité un intérêt scientifique continu au fil des siècles.

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Exploration de la Structure Bactérienne : Les Fondations de la Vie Microscopique

La compréhension de la structure des bactéries est essentielle pour saisir leur fonctionnement et leur rôle dans le monde microbien.

Dans cet article, nous allons explorer les éléments clés qui composent une bactérie, ainsi que les conditions physico-chimiques qui influencent leur croissance et les différentes classifications auxquelles elles sont soumises.

1.2. La Composition Bactérienne

Les Enveloppes Externes :

  • La Capsule : Cette couche externe, principalement composée de polysaccharides, est un élément facultatif de la bactérie. La capsule, détectable par une coloration à l’encre de Chine, joue un rôle majeur dans la virulence en empêchant la phagocytose.
  • Le Glycocalyx : Cette structure en réseau de fibres polysaccharidiques s’étend depuis la surface bactérienne vers son environnement. Son rôle principal est de favoriser l’adhésion des micro-organismes entre eux et à des surfaces solides.
  • La Paroi : Cette enveloppe rigide est essentielle à la bactérie, définissant sa forme et étant la cible de nombreux antibiotiques. Elle est également la zone d’action de lysozyme et abrite les récepteurs de bactériophages.
  • Membrane Cytoplasmique : Une fine couche, avec une épaisseur d’environ 6 nm, qui délimite le cytoplasme bactérien. Elle se compose principalement de 60 à 70 % de protéines et de 30 à 40 % de lipides. Cette membrane semi-perméable régule les échanges entre le cytoplasme et l’environnement.

Constituants Internes :

  • Le Cytoplasme : Le cytoplasme des bactéries présente une structure simplifiée par rapport aux cellules eucaryotes. Il ne contient pas de réticulum endoplasmique, d’organelles telles que les mitochondries ou les chloroplastes, ni d’appareil de Golgi. Il est principalement constitué de ribosomes et de diverses inclusions.
  • Le Chromosome Bactérien : Équivalent du noyau des cellules eucaryotes, le chromosome bactérien n’est pas délimité par une membrane, ce qui facilite les échanges entre le noyau et le cytoplasme.
  • Les Plasmides : Des fragments d’ADN bicaténaire extra-chromosomique à réplication autonome. Ils se présentent sous forme de structures circulaires superenroulées et peuvent être présents en plusieurs exemplaires dans une même bactérie. Certains plasmides, comme le facteur F, interviennent dans le processus de conjugaison et dans la résistance aux antibiotiques.

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Les Appendices Externes :

  • Les Flagelles : Présents chez certaines bactéries, les flagelles sont des organes de locomotion qui confèrent à la bactérie sa mobilité. Ils jouent également un rôle dans l’antigénicité.
  • Les Pili : Deux types de pili sont observés : les pili communs ou fimbriae, de courts filaments, et les pili s e x u els, plus longs et impliqués dans la conjugaison bactérienne.
1.3. Conditions de Croissance

Plusieurs facteurs physico-chimiques influencent la croissance bactérienne, notamment la température, le pH et la pression osmotique. Les bactéries se répartissent en catégories en fonction de leur comportement vis-à-vis de ces conditions.

1.4. Classifications Bactériennes

Les bactéries sont classées selon divers critères, notamment leur comportement face à l’oxygène (aérobies strictes, micro-aérophiles, anaérobies strictes, aéro-anaérobies facultatives) et leur coloration de Gram (Gram positif et Gram négatif), qui révèle la composition de leur paroi.

En résumé, l’étude de la structure bactérienne est une composante fondamentale de la microbiologie, nous permettant de mieux comprendre ces micro-organismes essentiels à de nombreux aspects de la vie sur Terre.

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1.5. Les Complexes Bactériens dans les Pathologies Parodontales

En 1998, Socransky a apporté une contribution majeure à la compréhension des pathologies parodontales en démontrant que les bactéries impliquées ne pouvaient plus être attribuées à une seule espèce.

À l’exception d’Aggregatibacter actinomycetemcomitans, il est désormais impossible de considérer qu’une seule bactérie est responsable de la pathogenèse parodontale.

Ainsi, les espèces bactériennes impliquées dans les pathologies parodontales ont été regroupées en complexes, une notion clé dans ce domaine.

Les complexes bactériens sont les suivants :

  • Complexes Individuels :
    • Actinobacillus actinomycetemcomitans sérotype b : Ce complexe agit de manière indépendante, sans être associé aux autres bactéries.
  • Complexes Regroupés :
    • Le Complex Jaune : Composé principalement de Streptococcus sp.
    • Le Complex Vert : Comprend Capnocytophaga spp., Actinobacillus actinomycetemcomitans sérotype a, Eikenella corrodens, et Campylobacter concisus.
    • Le Complex V io l et : Contient Veillonella parvula et Actinomyces odontolyticus.
    • Le Complex Orange : Englobe Campylobacter gracilis, Campylobacter rectus, Campylobacter showae, Eubacterium nodatum, Prevotella intermedia, Prevotella nigrescens, Peptostreptococcus micros, Campylobacter rectus, et les sous-espèces de Fusobacterium nucleatum.
    • Le Complex Rouge : Inclut Porphyromonas gingivalis, Tannerella forsythensis, et Treponema denticola.

Ces complexes bactériens interviennent à différents stades de la pathologie parodontale. Les complexes vert et jaune sont parmi les premiers à apparaître.

Le complexe vi ol e t peut servir de lien entre ces derniers et les complexes orange et rouge, que l’on retrouve généralement dans les poches parodontales les plus profondes, caractérisant les phases actives des parodontites.

Cette classification en complexes bactériens offre une perspective plus nuancée de la contribution des bactéries à la pathologie parodontale, mettant en évidence l’importance des interactions entre différentes espèces microbiennes dans le développement et la progression de ces affections.

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1.6. Complexes Bactériens et Interactions Microbiennes

Dans la suite de notre exploration des pathologies parodontales, il est essentiel de mentionner l’importance des complexes bactériens et des interactions microbiennes dans ce contexte.

1.6.1. Complexes Bactériens

Selon les travaux de Socransky, on constate que les complexes orange et rouge sont plus fréquemment observés en proportions plus importantes chez les patients qui répondent peu aux traitements [4].

Cette observation souligne l’importance de ces complexes dans la progression des pathologies parodontales.

1.6.2. Interactions Microbiennes

Au sein d’une même communauté bactérienne, chaque cellule bactérienne établit un réseau complexe de relations avec ses voisines. Ces interactions microbiennes sont cruciales pour maintenir l’équilibre écologique de la communauté.

On distingue deux types d’interactions microbiennes : les interactions positives et les interactions négatives.

Interactions Positives :
  • Le Mutualisme : Dans cette relation, deux espèces bénéficient mutuellement de leur association.
  • Le Commensalisme : Dans ce cas, l’une des espèces tire un bénéfice de l’association sans causer de préjudice à l’autre.
  • La Synergie : L’interaction entre deux espèces bactériennes génère un effet plus important que la somme des effets de chaque espèce prise individuellement.
Interactions Négatives :
  • La Compétition : C’est une relation où deux populations bactériennes se disputent des ressources essentielles pour leur survie et leur multiplication. Cette compétition peut impliquer des espèces bactériennes différentes ou même des membres de la même espèce.
  • L’Antagonisme : Il se manifeste lorsque l’une des populations bactériennes sécrète des produits qui inhibent d’autres populations ou modifient négativement l’environnement physico-chimique.

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2. Définitions du Biofilm

Dans la cavité buccale, les surfaces dentaires et gingivales sont constamment exposées à la salive et au fluide gingival, créant un environnement chaud et humide propice à la croissance d’une diversité remarquable de micro-organismes, à l’origine de la formation du biofilm [3].

Plusieurs définitions du biofilm ont été proposées :

  • Selon List Garten (1976), la plaque bactérienne est une accumulation microbienne non minéralisée qui adhère à la surface des dents, des restaurations dentaires et des prothèses. Elle est structurée en agrégats de bactéries entourés d’une matrice organique composée de glycoprotéines salivaires et de produits bactériens.
  • Lindhe (1983) décrit la plaque comme un matériau blanc et mou, constitué d’agrégats bactériens, de leucocytes et de cellules épithéliales desquamées qui se développent à la surface des dents et d’autres structures buccales solides.
  • Selon Christian Mouton, la plaque est une accumulation hétérogène, adhérente à la surface des dents ou présente dans l’espace gingivo-dentaire. Elle est composée d’une communauté microbienne riche en bactéries aérobies et anaérobies, enrobées dans une matrice intercellulaire de polymères d’origine microbienne et salivaire. Ce dépôt est mou, adhérent, résistant, terne, et de couleur blanche à jaunâtre, se formant en quelques heures et résistant à l’élimination par un jet d’eau sous pression [9].

En résumé, la compréhension des complexes bactériens, des interactions microbiennes et du biofilm est cruciale pour appréhender les pathologies parodontales, des affections complexes influencées par une multitude de facteurs microbiens et environnementaux.

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3. Différents Types de Biofilm Dentaire

Le biofilm dentaire se présente sous diverses formes, différenciées en fonction de plusieurs critères, notamment leur localisation, leurs propriétés et leur potentiel pathogène.

Parmi ces distinctions, deux types principaux de plaque dentaire se dégagent, correspondant à des micro-environnements buccaux distincts :

3.1. Le Biofilm Supra-Gingival

Le biofilm supra-gingival est la couche de plaque présente sur la couronne dentaire. Il se caractérise principalement par les éléments suivants :

  • Localisation : Il se situe sur la surface visible des dents.
  • Caractère Aérobie : Il est principalement aérobie strict, ce qui signifie qu’il prospère en présence d’oxygène.
  • Interaction avec la Salive : Il est en contact avec la salive.
  • Épaisseur Variable : Lorsqu’il est mince, il peut être invisible à l’œil nu.
  • Zones d’Accumulation : Il s’accumule principalement dans des zones difficiles à atteindre avec les mesures d’hygiène dentaire, notamment sous la ligne du contour des dents (la zone bombée) et entre les dents voisines (espaces interproximaux).
  • Absence sur les Surfaces Sollicitées : Il est généralement absent des surfaces soumises à une friction pendant la mastication, comme les cuspides des dents.

La quantité de biofilm présent dans la bouche varie selon le niveau d’hygiène buccale de l’individu.

Elle peut être de 5 à 20 mg chez une personne ayant une hygiène buccale satisfaisante, tandis qu’elle peut atteindre environ 50 à 200 mg, voire plus, chez une personne négligeant son hygiène buccale [4].

3.2. Le Biofilm Sous-Gingival

Contrairement au biofilm supra-gingival, le biofilm sous-gingival se forme en dessous du liseré gingival.

Cependant, il est important de noter que la distinction entre les deux types de biofilm est arbitraire, car il peut y avoir une transition graduelle entre les deux environnements et les communautés microbiennes qui les composent.

Le biofilm sous-gingival présente des caractéristiques spécifiques liées à son emplacement et à son interaction avec les tissus gingivaux.

Cependant, les deux types de biofilm sont cruciaux pour comprendre la santé buccale globale et les pathologies associées.

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Figure : biofilm supra gingival + le biofilm bactérien

3.2. Le Biofilm Sous-Gingival

L’espace gingivo-dentaire constitue un environnement unique au sein de la cavité buccale, regroupant divers types de surfaces, notamment une paroi dure et une paroi épithéliale.

Cette dernière est elle-même composée de plusieurs épithéliums, dont l’épithélium de la gencive marginale (kératinisé), l’épithélium du sillon (non kératinisé) et l’épithélium de jonction, qui assure la fixation de la gencive autour de la dent.

Les communautés bactériennes qui s’accumulent dans le sillon gingivo-dentaire forment ce que l’on appelle la plaque sous-gingivale. Cette plaque est pratiquement exclusivement anaérobie et est en contact avec le fluide gingival.

Elle ne peut pas être identifiée visuellement car elle est dissimulée par la gencive. Comparée à la plaque supra-gingivale, elle est moins adhérente et moins dense [4].

3.3. Biofilm Péri-Implantaire

Le biofilm ne se développe pas uniquement sur les dents naturelles, mais également sur des surfaces artificielles exposées à l’environnement buccal, telles que les implants dentaires [8].

3.4. Biofilm des Sillons Occlusaux

Le biofilm présent dans les sillons occlusaux, notamment dans les sillons et les fossettes des dents, est particulièrement cariogène.

Il contient des micro-organismes tels que les streptocoques acidogènes et les lactobacilles, qui produisent des acides responsables de la carie dentaire [8].

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4. Structure et Composition du Biofilm

Le biofilm se caractérise par une structure hétérogène composée principalement de deux éléments : la matrice extracellulaire et les cellules bactériennes.

4.1. Structure du Biofilm

Les biofilms présentent une organisation particulière, composée de micro-colonies individuelles.

Environ 85 % de la structure du biofilm est constituée de matrice extracellulaire, tandis que les 15 % restants sont des cellules bactériennes.

Cette matrice présente une architecture en forme de “tours” ou de “champignons”, avec des canaux d’eau libre intercalés entre les micro-colonies [1].

En résumé, la diversité des types de biofilm dentaire, tels que le biofilm sous-gingival, péri-implantaire et des sillons occlusaux, ainsi que la complexité de leur structure et de leur composition, jouent un rôle essentiel dans les processus de santé buccale et de développement de pathologies buccales.

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c. Adhérence Bactérie-Bactérie et Moyens de Fixation

c.1. Adhérence Bactérie-Bactérie

L’adhérence entre les bactéries peut se produire de deux manières distinctes : l’adhérence inter-bactérienne, qui implique la liaison entre deux bactéries libres, et la co-adhérence, qui concerne la liaison d’une bactérie libre à une autre déjà fixée. Ces interactions bactérie-bactérie résultent d’interactions spécifiques entre une protéine de surface d’une bactérie et le récepteur complémentaire d’une autre bactérie “partenaire”.

La co-adhérence, également appelée agrégation ou co-agrégation, peut se produire de manière homotypique (entre bactéries de la même espèce) ou hétérotypique (entre bactéries de différentes espèces).

Les streptocoques sont un exemple d’espèces bactériennes capables d’interagir de manière homotypique et hétérotypique.

La co-agrégation est un phénomène de succession décrit pour environ 700 souches appartenant à 14 g e nr es bactériens différents. Elle favorise les échanges nutritionnels et métaboliques entre les bactéries et joue un rôle essentiel dans l’épaississement du biofilm dentaire.

c.2. Moyens de Fixation des Bactéries

Chaque bactérie possède un ou plusieurs moyens de se fixer à d’autres bactéries, et le nombre d’espèces bactériennes différentes capables de s’attacher les unes aux autres est considérable.

Parmi les moyens de fixation, on peut citer les glycocalyx, une matrice hydratée composée de fibres polysaccharidiques.

Cette matrice forme un feutrage dense et adhérent aux surfaces inertes et vivantes, facilitant les échanges entre les bactéries et favorisant leur regroupement au sein du biofilm [8].

En résumé, les interactions bactérie-bactérie et les mécanismes de fixation jouent un rôle crucial dans la formation, la cohésion et la densité du biofilm dentaire, contribuant ainsi à la complexité de cette structure microbiologique dans la cavité buccale.

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Fimbriae et Pili

Les fimbriae et les pili sont de fines et longues structures de surface qui permettent la colonisation des tissus de l’hôte par les bactéries. Initialement appelées “pili” lors de leur découverte sur les entérobactéries, elles sont aujourd’hui plus couramment désignées sous le terme “fimbriae,” qui décrit mieux leur aspect en forme de cheveux.

Deux principaux types de fimbriae sont identifiés :

Type 1 : Ces fimbriae facilitent la colonisation des tissus durs et sont pourvus de ligands qui interagissent avec des protéines riches en prolines (PRP) salivaires ainsi qu’avec les stathérines présentes dans la pellicule acquise.

Type 2 : Ces fimbriae interviennent dans l’adhérence bactérie-bactérie ainsi que dans la fixation aux cellules épithéliales, aux leucocytes et aux streptocoques oraux.

L’Acide Lipoteichoïque

L’acide lipoteichoïque est une molécule linéaire intégrée à la paroi des bactéries à Gram positif (g+).

Cette molécule est dite “amphipathique” car elle comprend un domaine hydrophile composé de glucides et un domaine hydrophobe constitué de lipides.

La partie lipidique s’insère dans la membrane cytoplasmique, tandis que la partie glucidique émerge à la surface de la paroi après l’avoir traversée. Les charges négatives de la partie hydrophile interagissent avec la surface électronégative de la pellicule grâce à un cation divalent, tel que le calcium (Ca++).

Ces interactions favorisent l’adhérence des bactéries aux surfaces et contribuent à la formation et à la cohésion du biofilm grâce à leurs propriétés adhésives [9].

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Communication au sein du Biofilm

Au sein du biofilm, les bactéries ont la capacité de communiquer entre elles par le biais de plusieurs systèmes, parmi lesquels les plus importants sont le transfert horizontal de gènes et la reconnaissance du quorum.

A. Transfert Horizontal de Gènes :

Le transfert horizontal de gènes repose sur une caractéristique spécifique des cellules procaryotes, qui sont dépourvues de noyaux, contrairement aux cellules eucaryotes.

Cela signifie que l’ADN et les plasmides circulent librement à l’intérieur de leur cytoplasme.

Ainsi, deux bactéries, sans être limitées par une barrière de g e n r e, peuvent échanger un brin d’ADN de leurs plasmides après une reconnaissance mutuelle, souvent facilitée par des pili intermédiaires.

B. Reconnaissance du Quorum :

Dans un biofilm devenu pathogène, la densité bactérienne d’une même espèce atteint un seuil critique, ce qui entraîne la division cellulaire et une croissance exponentielle des bactéries.

Ce processus est régulé par un mécanisme de communication appelé le “quorum sensing.” Les bactéries utilisent des signaux moléculaires pour échanger des informations entre elles.

À faible densité, ces signaux moléculaires se dispersent rapidement dans l’environnement, mais lorsque la densité bactérienne atteint un niveau élevé, la concentration du signal moléculaire est immédiatement détectée par les bactéries.

Ces signaux moléculaires sont reconnus par des récepteurs protéiques à l’intérieur des cellules, lesquels identifient des séquences d’ADN spécifiques de gènes et régulent leur expression.

Cela permet de coordonner les comportements des bactéries d’une même espèce en fonction de leur densité dans le biofilm.

Ce n’est qu’à partir d’une certaine concentration que les bactéries deviennent agressives, ce qui favorise le développement de la maladie parodontale.

Le quorum sensing permet également une coopération entre des bactéries de différentes espèces au sein du biofilm, favorisant ainsi la communication et la régulation des activités microbiennes [11].

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Caractéristiques de l’Adhérence Bactérienne

L’adhérence bactérienne est un processus complexe qui dépend de diverses caractéristiques physicochimiques :

  • Forces Répulsives : Les phospholipides de l’émail dentaire et les protéines de la pellicule acquise, ainsi que la surface bactérienne, portent des charges négatives. Ces charges génèrent des forces électrostatiques de répulsion entre les bactéries et les surfaces dentaires.
  • Forces Électrodynamiques : Les forces attractives, appelées forces de van der Waals, maintiennent la bactérie à une certaine distance du substrat dentaire.
  • Interactions Électrostatiques : Les cations divalents, tels que Ca++, forment des liaisons entre les charges négatives des deux surfaces, dentaires et bactériennes.
  • Interactions Hydrophobes : Ces interactions ont lieu entre des séquences moléculaires hydrophobes présentes à la surface de la bactérie et du substrat, créant un environnement stable favorable à d’autres interactions.
  • Interactions Spécifiques : Ces interactions sont responsables de liaisons fortes et sélectives, généralement de type ligand-récepteur. La plupart des adhésines bactériennes sont des protéines portées par les fimbriae, qui se lient aux hydrates de carbone présents sur les surfaces.
  • Réactions Enzyme-Substrat : Par exemple, Streptococcus mutans possède une enzyme glycosyltransférase intégrée à sa surface. Cette enzyme synthétise des polymères de glycane en présence de saccharose. Le glycane adhère fortement à la surface dentaire, maintenant ainsi la bactérie sur la dent.
La Maturation du Biofilm

La maturation du biofilm est le résultat de la prolifération bactérienne et du développement de sa matrice intercellulaire, qui est directement influencée par le métabolisme bactérien.

Au fur et à mesure que les couches bactériennes s’accumulent, la plaque devient plus épaisse. La maturité du biofilm est généralement atteinte après environ 30 couches bactériennes.

La Fraction Cellulaire :

La maturation commence par l’accroissement en nombre et en volume des bactéries déjà présentes, suivie de l’adhésion de nouvelles bactéries. Cette étape conduit à la formation d’une couche dense de cellules bactériennes.

La diversité bactérienne augmente également avec le recrutement de nouvelles espèces, favorisé par l’adhésion interbactérienne hétérotypique.

Finalement, l’apogée est atteint avec l’accumulation de biofilm sur les dents, résultant d’un équilibre entre la fixation, la croissance et l’élimination des bactéries.

La Fraction Acellulaire (Matrice) :

La matrice intermicrobienne, située entre les bactéries du biofilm dentaire, est formée par les microorganismes du biofilm, la salive et l’exsudat gingival.

Elle contribue à la stabilité du biofilm et au maintien de sa structure.

Le Détachement du Biofilm :

Le détachement des bactéries du biofilm peut être un phénomène passif, dépendant des forces du milieu environnant, telles que les flux.

Cependant, il peut également être initié activement par les bactéries elles-mêmes, ce qui leur permet de coloniser de nouvelles surfaces et de survivre lorsque l’espace et les nutriments sont limités.

Le détachement peut se produire de manière individuelle ou sous forme de petits ou grands amas ou fragments, selon les mécanismes impliqués.

Ainsi, un biofilm établi constitue un réservoir de bactéries viables capables de coloniser d’autres surfaces.

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Spécificité microbiologique des maladies parodontales :

A. Hypothèse du biofilm non spécifique : Cette hypothèse considère que les maladies parodontales résultent de la production de produits nocifs par l’ensemble de la flore de la plaque dentaire.

Cependant, la reconnaissance de différences de plaque dans des sites cliniquement différents a conduit à la transition vers l’hypothèse du biofilm spécifique.

B. Hypothèse du biofilm spécifique : Selon cette hypothèse, seules certaines plaques sont pathogènes, et leur pathogénicité dépend de la présence ou de l’augmentation de certains microorganismes. L’identification d’Aggregatibacter actinomycetemcomitans comme agent pathogène dans la parodontite agressive localisée a contribué à l’acceptation de cette hypothèse.

C. Hypothèse du biofilm écologique : Dans les années 1990, l’hypothèse du biofilm écologique a été développée pour unifier les théories existantes sur le rôle de la plaque dentaire dans les maladies bucco-dentaires.

Selon cette hypothèse, à la fois la quantité totale de plaque dentaire et la composition microbienne spécifique de la plaque peuvent contribuer à la transition de la santé à la maladie.

Modification du biofilm au cours des pathologies parodontales :

1. Gingivite : Lors de l’inflammation de la gencive marginale associée à la gingivite, le biofilm augmente en épaisseur et en surface.

La gingivite clinique est associée à une plaque bactérienne plus organisée, comprenant des cocci gram-positifs, des bâtonnets gram-positifs et des filaments (actinomyces), ainsi que des cocci gram-négatifs (Veillonella parvula) et des bactéries aérobies facultatives.

La forme sévère de la gingivite peut impliquer Porphyromonas gingivalis.

2. Gingivite de la f e m m e e n ce in t e : Pendant la grossesse, une augmentation des bactéries anaérobies Gram-négatives est observée, liée à l’augmentation des hormones œstrogène et progestérone dans le fluide gingival.

3. GUN (gingivite ulcéronécrotique) : Cette forme de gingivite est associée à la présence de Prevotella intermedia, Treponema pallidum et à la pénétration tissulaire des spirochètes.

4. Maladies parodontales nécrosantes : Ces maladies sont associées à des bactéries telles que Fusobacterium spp. et des spirochètes (Treponema), ainsi que Prevotella intermedia.

5. Parodontite agressive : On observe une augmentation de la proportion d’Aggregatibacter actinomycetemcomitans, ainsi que de certaines populations de Porphyromonas gingivalis.

6. Parodontite à adhérence Leucocitaire (PAL) : Cette forme est caractérisée par la présence d’Aggregatibacter actinomycetemcomitans comme agent pathogène primaire.

7. Parodontite à adhérence Gingivale (PAG) : Cette forme est associée à Aggregatibacter actinomycetemcomitans, Capnocytophaga, Porphyromonas gingivalis, Prevotella intermedia, Tannerella forsythia et Treponema denticola.

8. Parodontie chronique : Elle est associée à Porphyromonas gingivalis et Tannerella forsythia.

9. Péri-implantites : L’échec implantaire bactérien est dû à une variation quantitative et qualitative de la flore bactérienne péri-implantaire, notamment une augmentation des germes anaérobies Gram-négatifs, la présence de spirochètes, Prevotella intermedia et Fusobacterium spp.

Action de la plaque sur les tissus durs de la dent : Différents types de microorganismes isolés des caries dentaires sont capables de produire de l’acidité, abaisser le pH de la surface de l’émail à un niveau proche de 4,5, et ainsi provoquer la déminéralisation de l’émail, conduisant à l’apparition de caries.

Certains microorganismes, tels que les streptocoques producteurs de dextrane, sont prédominants dans ce processus de formation de caries.

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Transformation du biofilm en tartre :

9.1. Définition du tartre : Le tartre est une masse calcifiée adhérente qui se forme sur la surface des dents naturelles et des prothèses dentaires. Il résulte de la calcification d’une plaque dentaire envahie par des cristaux de sels minéraux, et il sert de moyen de rétention pour le biofilm dentaire.

Le tartre dentaire est principalement composé de minéraux, de composants organiques et inorganiques.

La formation des cristaux de tartre commence à la périphérie de la membrane bactérienne, s’étendant ensuite à toute la matrice interbactérienne et aux bactéries elles-mêmes.

La formation de tartre commence après environ 38 heures et prend environ 12 jours pour aboutir à une calcification complète.

9.2. Classification du tartre : Le tartre peut être classé en deux catégories principales du point de vue topographique : le tartre sus-gingival et le tartre sous-gingival.

A. Tartre sus-gingival (tartre salivaire) : Il se trouve au-dessus de la gencive marginale et est visible dans la cavité buccale.

Il est généralement de couleur blanche ou blanc jaunâtre, de consistance dure et argileuse, et peut être facilement détaché de la surface dentaire. La couleur du tartre sus-gingival peut être modifiée par certains facteurs tels que le tabac et les pigments alimentaires.

Il se forme le plus fréquemment et en plus grande quantité sur les faces vestibulaires des molaires supérieures en regard du canal de Sténon et sur les faces linguales des incisives mandibulaires en regard du canal de Wharton.

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B. Tartre sous-gingival (tartre sérique) : Ce type de tartre se trouve sous la crête de la gencive marginale, généralement à l’intérieur des poches parodontales, et il n’est pas visible lors d’un examen buccal classique.

Il a une texture dense et dure, et sa couleur est généralement marron foncé ou noir verdâtre. Contrairement au tartre sus-gingival, le tartre sous-gingival adhère fermement à la surface dentaire. Sa formation est influencée par les composants présents dans le fluide gingival.

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9-3. Composition du tartre :
  • Contenu organique : Le tartre, étant essentiellement une plaque dentaire calcifiée, présente une composition organique similaire à celle de la plaque. Il est composé d’un mélange de complexes protéines-polysaccharides, de cellules épithéliales desquamées, de leucocytes et de divers types de micro-organismes.
  • Contenu inorganique : Les minéraux constituent une part importante du tartre. On y trouve principalement de l’hydroxyapatite (58%), du whitlockite (21%), du phosphate octocalcique (21%) et du brushite (9%). Il est intéressant de noter que la composition minérale du tartre sous-gingival peut varier, avec une concentration plus élevée de magnésium et de whitlockite, et une concentration plus faible de brushite et de phosphate octocalcique, ainsi qu’un rapport phosphocalcique plus élevé en fonction de la profondeur des poches parodontales.

9-4. Formation : Le tartre commence à se former entre le 2e et le 14e jour à partir de la plaque dentaire. En général, la matrice inter-bactérienne se calcifie en premier, suivie de la dégénérescence et de la minéralisation des bactéries elles-mêmes.

9-5. Attache du tartre : L’attache du tartre aux tissus durs de la dent, tels que l’émail, le cément et la dentine exposée, peut se faire de plusieurs manières.

Il peut s’attacher via la pellicule acquise, par l’apposition directe des cristaux inorganiques du tartre à ceux de la surface dentaire, ou encore par la pénétration dans des irrégularités dentaires, comme les caries, les fissures et les résorptions.

le biofilm bactérien

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